Je ne suis pas un homme de lettres, pas même un littérateur.
Mais il me faut avouer que parfois, à mon insu, la ville me permet d’en être.
Il suffit que je marche longuement à travers Saint Nazaire, jusqu’au port. Là-bas, je me déleste d’une tonne de soucis. Après quoi, ma nouvelle ligne de flottaison plonge ma conscience dans les nuages.
Sur le chemin du conservatoire Boris Vian, le pas allégé, des mots viennent se fracasser sur mon nez avec une douceur infinie, parfaitement silencieuse. Ils sentent l’écume des jours.
Je me sens balloté par l’âme de la ville. La mienne se met à tanguer et me fait faire des embardées.
Quelque chose s’écrit dans ce mouvement imprimé à mon corps, un tango subtil dans les rues de la ville.
Participation libre et consciente
Conscience libre de ma participation
Libre de ma conscience participative
Je suis embarqué et je finis par m’égarer,
devant un garage.
En façade, il est écrit en grandes lettres « Fabrique de l’Ouvert ».
Une pancarte noire sur la porte mentionne à la craie :
« Ici on ne fait pas débit mais, en l’espèce, les pourlires sont les bienvenus ! ».
Je reste au seuil de la porte, ouverte. Mon regard parcourt le vaste espace intérieur.
Plusieurs œuvrières et œuvriers font atelier. C’est évident : ici, on tisse de l’espoir.
Au-dessus de ma tête, un goéland d’Audoin se pose sur le toit. Immobile, plumes frissonnantes au zéphyr, il fixe l’horizon. Ce larus n’a rien de commun. Son silence trahit sa provenance, une île invisible au large de mon imaginaire : l’île ESPERE.
Je ne suis pas un homme de lettres,
je suis à Saint Nazaire.
POL
Texte écrit dans le cadre de l’atelier « Écrire dans la ville » animé chaque 1er mardi du mois par l’écrivain Joël Kérouanton sur le site de l’espace créatif, innovant et culturel « LE GARAGE » à Saint Nazaire.
